Prologue
***
Emma
La voiture ralentit tandis que Franck cherche où stationner dans l’une des rues à proximité de l’université. Je souris et je m’étire en le regardant manœuvrer habilement pour se garer. J’adore ses mains… en fait, j’aime tout de lui, ses yeux trop bleus, son allure à la fois chic et décontractée, la joie de vivre qui irradie de chacun de ses sourires craquants.
Je soupire dépitée. J’ai un cours de maths dans une demi-heure. Je n’ai aucune envie d’y aller et de devoir me séparer de mon charmant touriste de petit ami. J’ai passé l’après-midi avec lui, et je ne veux pas que cette journée de rêve s’achève par un barbant retour à la réalité. Je tente une nouvelle fois de le faire céder :
– Personne ne le saura si je sèche…
– Emma, sois sérieuse ! Tu es à une semaine des examens semestriels, me répond-il, amusé par mon insistance en coupant le moteur. Si on reste ensemble ce soir, nous pourrions faire beaucoup de choses, mais certainement pas réviser.
– Tu n’es vraiment pas drôle, Franck Dumont ! Tu me condamnes à passer ma soirée le nez dans les bouquins. C’est génial !
Il détache sa ceinture et se tourne vers moi, amusé par ma grimace dépitée. Il me met une pichenette sur le nez, ses yeux clairs pétillant de rire. Ma mère dit que je suis têtue, mais je crois qu’il l’est autant que moi, c’est pour ça qu’il ne cède même pas au chantage affectif… J’adore ce mec.
– Je t’appelle ce soir ? propose-t-il pour adoucir son refus.
– Ce que je veux, c’est être avec toi, collée à toi, et pas pendue au téléphone.
Il s’incline et pose un baiser joueur et tendre sur ma bouche. Vivement, je m’agrippe à sa nuque et je lui réclame bien plus. Cette fois, il cède. Notre échange devient vite passionné, alors qu’il ne se prive pas de me caresser au travers de mon pantalon et qu’une de ses mains se faufile sous mon tee-shirt.
Seulement, nous sommes dans une voiture, dans une rue fréquentée, en pleine journée alors Franck finit par calmer le jeu.
– Bientôt, on pourra passer tout notre temps ensemble, je te le promets. Mais là, tu dois d’abord penser à réussir ton année.
J’obtempère à contrecœur à la voix de la raison. Je soupire une nouvelle fois.
– Pas d’appel, autrement, je te préviens, je débarque à ton hôtel ! Tu sais que j’en ai marre de jouer les étudiantes modèles ?
Franck éclate de rire et me vole un nouveau baiser espiègle.
– On se retrouvera demain matin sur la plage pour surfer, ce n’est pas une éternité quand même. Tu devrais survivre.
Je lui adresse une grimace et, sur un dernier baiser, je me décide à descendre de la voiture en ne me privant pas de ronchonner. Il remet le moteur en route, et je lui envoie des baisers lorsqu’il s’éloigne, indifférente à l’idée qu’on puisse me voir. Je suis amoureuse autant que le monde entier le sache.
Je remonte mon sac sur mon épaule, et je me mets en route en traînant un peu des pieds. Je tourne à l’angle de la rue quand… Tout s’arrête là.
***
C’est mon gémissement qui me réveille. Je tente de rouler sur le côté pour soulager la douleur de mon crâne, mais je n’y parviens pas. J’essaie de déglutir. Cela me fait tellement mal que je dois m’y reprendre à deux fois. J’ai la sensation que du papier de verre tapisse ma bouche et ma gorge.
Pas la grippe…
Je l’ai eue l’année dernière. J’ai mis un mois à récupérer, et là j’ai les examens qui approchent, je ne peux pas me permettre d’être malade. Avec effort, je parviens à pivoter. Je cherche mon oreiller. Je tends la main, mais elle heurte un mur.
Qu’est-ce que ça veut dire ?
Je frissonne. Où est ma couette ? Je manque de replonger avec la sensation de m’évanouir. Je me secoue. Il faut que j’aille prendre de l’aspirine et prévenir maman, qu’elle appelle le médecin. Je suis trop mal en point pour le faire. J’ai mal à la tête, au dos, dans toutes les articulations. C’est horrible. J’ai l’impression que je vais vomir. Je ne me suis jamais sentie aussi malade de toute ma vie.
Soudain, alors que je lutte pour retrouver un peu plus de conscience, un choc violent ébranle tout l’univers autour de moi. Mes yeux s’ouvrent par réflexe. Mes cils collés s’arrachent en s’écartant. Ma vue met un moment à se stabiliser. Seulement, même quand le tangage s’arrête, ce que mon cerveau identifie n’a aucun sens.
Je referme les paupières. Je me concentre très fort et, lentement, je les rouvre. Je suis tournée vers la gauche. De mon lit, je devrais voir un rayon de lumière – le soleil ou les réverbères – filtrer entre mes rideaux. Cela devrait me permettre de distinguer mon bureau, à côté de la fenêtre. Mais, il n’y a rien de tout cela. Un éclairage verdâtre, très faible, se reflète sur une paroi métallique à trente centimètres de mon nez.
Une soudaine nausée me prend. J’enfonce mes ongles dans mes paumes de toutes mes forces, à m’en faire saigner, pour que la douleur provoque une montée d’adrénaline et m’empêche de m’évanouir. Je ne me souviens plus à quelle occasion oncle Chris m’a expliqué cette technique, mais je le fais. D’instinct. C’est vital.
Ça marche !
Le monde se stabilise, et le mur d’acier est toujours là.
J’entends des gémissements. Je mets plusieurs secondes à comprendre que ce sont les miens. Je m’oblige au silence. Je ne dois pas paniquer et émerger du marasme dans lequel baignent mes neurones. Je ferme les yeux et je me concentre sur ma respiration. J’agite mes doigts et mes orteils. J’essaie de bouger, mais je réalise à cet instant que je suis entravée. Mes mains et mes chevilles sont liées !
Mais qu’est-ce que ça signifie ?
A suivre…
Où le trouver ?
